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À travers la grille du collège j’aperçois la cour
des classes…
C’est donc là que je suis venu, depuis ma troisième jusqu’à
ma rhétorique, avec des livres sous le bras, des devoirs dans mon cahier
? Il fallait pousser une de ces portes, entrer et rester deux heures –
deux heures le matin, deux heures le soir !
On me punissait si je parlais, on me punissait si j’avais fait un gallicisme dans un thème, on me punissait si je ne pouvais pas réciter par cœur dix vers d’Eschyle, un morceau de Cicéron ou une tranche de quelque autre mort ; on me punissait pour tout.
La rage me dévore à voir la place où j’ai si bêtement souf-fert.
En face, est la cage où j’ai passé ma dernière année. J’ai bien envie de me précipiter là-dedans et de crier au professeur :
« Descendez donc de cette chaire et jouons tous à saute-mouton
! Ça vaudra mieux que de leur chanter ces bêtises, normalien idiot
! »
Je me rappelle surtout les samedis d’alors !
Les samedis, le proviseur, le censeur et le surveillant gé-néral venaient proclamer les places, écouter les notes.
Est-ce qu’ils ne se permettaient pas, les niais, de branler la tête en signe de louange, quand j’étais premier encore une fois !
Niais, niais, niais ! Blagueurs plutôt, je le sais maintenant. Vous n’ignoriez pas que c’était comme un cautère sur une tête de bois, cette latinasserie qu’on m’appliquait sur le crâne !
Plutôt que de repasser sous ces voûtes, de rentrer dans ces classes, plutôt que de revoir ce trio et de recevoir ces caresses de cuistres, je préférerais, dans cette cour qui ressemble à un cirque, me battre avec un ours, marcher contre un taureau en fureur, même commettre un crime qui me mènerait au bagne ! oh ! ma foi, oui !
Je reconnais ces rues basses qui, avec leurs murs effrités et jaunes,
ressemblent à des roqueforts moisis qui s’écroulent. Les
professeurs demeurent volontiers dans ces endroits à mine de vieux fromage.
Le maître de mathématiques pour les petites classes restait dans
un de ces coins gâtés. Un homme affreux, boiteux, velu, qui était
sale comme un peigne et dont la narine enflammée par le tabac était
toujours rouge comme un naseau de cheval ! Mon père lui avait prêté
quelque argent, qu’il ne rendait pas. Pour se rembourser, on m’envoyait
à lui. Quelles heures épouvantables j’ai passées
là. Il m’apprenait la théorie de l’arithmétique,
ce velu !
La théorie, qu’est-ce que c’est que ça ! Est-ce que je ne suis pas trop jeune ? Je n’ai que quatorze ans ! Je voudrais savoir comment on fait, voilà tout ! Je n’ai pas besoin de savoir pourquoi c’est comme ça ? Je ne comprendrais jamais, ma tête pète à suivre ce que vous dites. Je ne voudrais pas que ma tête pétât…
Ma mère était bien contente que je m’ennuie à mourir. Si ça avait été un amusement, il n’y en aurait pas eu pour vingt sous.
« Tu t’es bien ennuyé la dernière fois ?
– Oh oui !
Elle avait l’air enchantée – Allons ! ce gueux-là ne nous volera pas tout ! Il embête Jacques énormément. »
Je la sais par cœur votre théorie à la fin ! Êtes-vous content ! Je la sais mot à mot comme dans l’armée, mais je ne sais pas faire l’opération. Quand il y a des zéros dans la multi-plication, je suis déjà bien embarrassé. Mais pour une division, il n’y a pas mèche, mon bonhomme !
« Il reste à devoir au moins pour dix francs, je te dis », a crié ma mère.
Mon père voulait délivrer le vieux. Il se juge remboursé.
Allons plus loin !
Voici un endroit que je hais bien !
On me promena sur cette place, de maison en maison, chez des gens de notre connaissance, un jour de distribution de prix, pour montrer mes livres.
J’avais l’air de vendre des tablettes de chocolat.
Une femme charmante, en robe gris d’argent – je la vois encore – n’avait pu cacher un sourire ; il lui était échappé un mot de bonté :
« Pauvre garçon ! »
En ai-je gardé un souvenir de ces distributions !
Il fallait bien avoir des prix cependant, puisque c’était utile à mon père.
Dans toutes ces rues de collège et de professeurs, je retrouve une douleur comique. Il me semble que j’ai un palmarès accroché dans le dos, et que ma mère me suit avec de la musique ! Je marche, malgré moi, comme un petit éléphant que promène une troupe de cirque.
Je me croise à chaque instant avec d'anciens cancres qui ne s'en portent
pas plus mal. Ils n'ont pas du tout l'air de se souvenir qu'ils étaient
les derniers dans la classe. Ils sont entrés dans l'industrie, quelques-uns
ont voyagé ; ils ont la mine dégagée et ouverte. Ils se
rappellent que je passais pour l'espoir du collège.
« Eh bien, que deviens-tu? Vas-tu un de ces jours faire parler de toi
?
Dis donc, est-ce vrai que tu t'en es mêlé et que tu a failli être
tué en décembre ? »
Il est interrompu par le rire et le coup de coude d'un autre qui dit :
« Allons donc, c'est pas Vingtras qui irait où l'on joue sa peau
! »
Que fais-tu ? Va-t-on un de ces jours entendre parler de toi ?
Que répondre ?
Un matin, je disparaîtrai pour n'avoir à rougir devant personne
de n'être rien, de ne rien gagner ; sans aucun espoir d'être quelqu'un
ni dejamais gagner quelque chose.
Introduction :
À travers une trilogie célèbre, Jules Vallès nous
fait revivre trois étapes de sa vie : l’enfance, l’adolescence
(Le Bachelier), et la révolte de l’âge adulte (L’Insurgé).
Le texte qui fera l’objet de notre commentaire est extrait du roman autobiographique
Le Bachelier, dans lequel le narrateur, sous le nom de Jacques Vingtras, nous
fait une visite guidée des lieux où il a étudié
pendant son adolescence, tout en se replongeant dans le souvenir.
Je me propose dans ce qui va suivre d’étudier le plan du passage,
de passer en revue les regards portés par le héros à travers
le lexique sur cette partie de son adolescence et enfin, le jugement qu’il
porte sur le système éducatif qui l’a formé.
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Les corrigés permettent, d'acquérir des méthodes de rédaction, et de prendre conscience des attentes du correcteur mais ils ne sont pas forcément une aide à long terme. N'oubliez pas que l'objectif est d'arriver à construire un devoir pour le jour du baccalauréat. Vous n'aurez plus internet sous la main. Il faut donc que la consultation des corrigés vous aide à vous préparer à cette épreuve. Cela ne doit pas être une solution de facilité. Je vous suggère donc de n'avoir recours à ces corrigés qu'après avoir fait l'effort de construire votre propre réflexion. Et si le corrigé qui est proposé ne va pas dans le sens de ce que vous avez fait n'en déduisez pas automatiquement que votre travail n'est pas correct. Au contraire, c'est l'occasion de réfléchir aux choix qui ont été faits par le correcteur et à vos propres choix. Vous pouvez en discuter avec votre professeur. Enfin, n'attendez pas que votre prof vous fasse tout le travail. Rappelez-vous qu'il peut y avoir de bons devoirs très différents entre eux.
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